Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






dimanche 20 janvier 2013

Il était une fois l'impressionnisme (1)




À l'heure où j'écris ces lignes, la collection impressionniste des époux Clark s'apprête à quitter Montréal pour continuer ses pérégrinations en attendant que les cimaises de l'institut qui l'accueille généralement puissent la recevoir de nouveau.

Contrairement à mon habitude, je vais vous présenter à chaud quelques toiles photographiées ce vendredi, car je m'aperçois que, lorsque je veux approfondir et faire quelques recherches, pente naturelle liée à ma profession, je manque de temps et je finis par reléguer mon billet aux oubliettes. Soyez donc clémentes et que les expertes comme Tilia et Nathanaëlle fassent preuve de quelque indulgence : je ne suis pas certaine que mes admirations de béotienne leur apprennent grand'chose.

Fi des tergiversations : je me lance!

Première salle

Cette première salle était tout entière consacrée au paysage et à la nature morte, genres longtemps considérés comme mineurs, en pleine expansion dans la seconde moitié du XIXe siècle. Je n'ai pas de clichés de cette salle qui était, au demeurant, assez sombre, car ne voulant ni gêner ni être gênée, je me suis rapidement dirigée vers la seconde.  J'avais toutefois retenu quelque chose de ma visite de la semaine dernière : peut-être est-ce un fait que vous connaissez très bien, mais j'avoue que cela m'a touchée et que je me suis dit que j'en parlerais à mes étudiants qui sont souvent d'assez fervents défenseurs de la préservation de la nature : les peintres de l'École de Barbizon et, tout particulièrement, Théodore Rousseau, sont à l'origine de la préservation d'une section de la forêt de Fontainebleau s'étendant sur 1 097 hectares, constituée en réserve artistique.  Cela m'a rappelé l'action de l'illustratrice Beatrix Potter qui, à sa mort, légua plus de seize kilomètres carrées de terre au National Trust d’Angleterre afin que les paysages et les fermes qu'ils abritaient soient conservés.

À défaut de vous présenter mes photos de cette salle, voici la toile de Rousseau qui inaugurait l'exposition : La ferme des landes- la maison du garde (1844-1867).


Cette illustration est empruntée à la Berkshire review qui a consacré un article à cette toile au moment de son entrée dans la collection du Clark Institute en 2010.


Seconde salle : 

Pissarro, Monet et Renoir se côtoyaient dans cette salle. D'ailleurs, Renoir avait un rôle privilégié dans l'exposition, non seulement par le grand nombre de ses peintures, mais aussi par toutes les citations émaillant le parcours qui étaient toutes de sa plume.  De lui, j'ai retenu ce Coucher de soleil qui date de 1879 ou de 1881, on ne sait pas exactement. 




Le carton explicatif indiquait qu'on la rapprochait parfois d'Impression, soleil levant (1874) de Monet qui est à l'origine de l'appellation du mouvement. Ce qui m'a surtout retenue ici, c'est la touche  de Renoir dont l'extrême diversité m'avait frappée lors d'une importante rétrospective présentée en 2007 au Musée national des Beaux-Arts à Ottawa. De Renoir, je connaissais jusque-là ce que tout le monde connaît. Le détail ci-dessous d'une toile de la collection permanente du Musée de la capitale nationale est ce que l'on associe souvent à ce peintre : 


La touche assez léchée n'a plus aucune texture. C'est une toile assez tardive de Renoir (1902-1903) montrant son fils Claude dans les bras de sa nourrice, Renée Jolivet.  Cette oeuvre est d'ailleurs intitulée : Claude et Renée. J'avoue n'avoir pas beaucoup d'intérêt pour cette oeuvre et préféré nettement celle-ci : 

Cette toile s'intitule Près du lac et date de 1880.


qui est bien antérieure.

Mais je m'égare, car ces deux dernières oeuvres n'étaient pas présentes dans l'exposition dont je suis en train de vous parler.

L'heure avançant et les obligations domestiques se faisant plus pressantes -entendre grand chien faisant du chantage nezmotif, collie oblige, pour avoir sa promenade que je ne veux pas faire à cause du froid de canard- je vais vous laisser pour aujourd'hui sur cette toile de Monet que j'ai beaucoup aimée et qui met en scène non pas les colverts d'Aloïs, mais des oies : 

Les oies dans le ruisseau, 1874





C'est ici tout autant la luminosité de l'oeuvre dont les couleurs ne semblent pas avoir été ternies que la variété de la touche qui m'ont retenue. Voici ce que précisait le premier paragraphe du petit carton explicatif : «Le début des années 1870 constitue une période cruciale dans l'évolution artistique de Monet. Sa palette s'éclaircit et il peint de plus en plus souvent en petites touches répétées afin de saisir les effets de la lumière dans l'air, dans le feuillage qui bruisse ou sur l'eau qui ondoie. L'artiste utilise en général le format paysage -horizontal. Ici, contrairement à son habitude, il utilise ce rare format portrait.»

Je vous laisse avant que la direction de la protection des animaux n'intervienne, car je laisse mon grand chien aboyer depuis tantôt.  Il faut dire qu'elle n'est guère patiente!

Rendez-vous mardi en fin de journée si je ne meurs pas congelée d'ici là...












21 commentaires:

  1. Donc, tu as pu photographier en toute tranquillité, c'était impossible lorsque nous sommes venus...
    Quant aux températures à Montréal (je les ai sur le bureau de mon ordinateur), elles sont impressionnantes cette semaine...
    Très belle journée, tout de même, amitiés.

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    1. Es-tu revenue récemment? Cela était interdit en juillet, puis, à ma grande surprise, j'ai constaté que c'était à nouveau permis, au grand soulagement des gardiens je crois, depuis quelque temps.

      Oui, la température invite au confinement même si le grand chien dont la robe est très protectrice réclame quand même ses promenades!!!

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  2. Pas de problème Marie-Josée : tu peux continuer à nous fournir des billets "à chaud" : cela te réussi parfaitement et je me suis régalée à découvrir les tableaux présentés à travers ton regard...

    Combien de neige à pelleter ce matin ? (oups !)

    Biseeeeeeeeeeees de Christineeeeeeeeeeeeeeeee

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    1. Tant mieux si tu apprécies! J'ai fait la part des choses en me disant que les expertes de notre petite communauté sont généralement plutôt indulgentes et que les autres trouveront peut-être profit à découvrir certaines toiles.

      Pas de neige cette semaine, mais du grand froid! Je ne sais pas ce que je préfère... En réalité, je fuirais bien en ce moment!

      Bises!!!!

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  3. Un billet à chaud fort bien détaillé...cette semaine je suis allée voir le film "Renoir" interprété par Michel Bouquet je me suis aperçu que je ne connais que certaines ouvres mais rien de sa vie !
    en ce moment nous avons 10 cm de neige et pour les non habitués c'est impressionnant de voir à quel point nous sommes paralysés...
    bonne semaine Marie-Josée

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    1. Oui, je suis, à travers les billets des copinautes, les répercussions des chutes de neige chez vous,et, vous l'avouerai-je, je ris un peu dans ma barbe ;0)

      Je ne sais pas si le film Renoir arrivera à Montréal. Par contre, si cela vous intéresse, je peux vous recommander deux lectures : Jean Renoir a recueilli les propos de son père dans un ouvrage simplement intitulé Pierre-Auguste Renoir, mon père . Ce livre se trouve facilement, car il est publié en Folio.

      J'ai aussi récemment acheté un petit livre de la collection Mille et une nuits : L'amour avec mon pinceau . Je crois que je tiens là la source des citations de Renoir qui se retrouvaient sur les murs de l'exposition. Ce sont des textes épars, des lettres et le tout se termine par une brève biographie et une bibliographie.

      En alternance avec la lecture des copies pour ne pas les envoyer valser!!!

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  4. Une forte belle collection, dont tu nous parles avec beaucoup de sensibilité. Un vrai plaisir, instants volés au grand chien mais qui valaient la peine de martyriser cette pauvre bête !! Remercie là de sa patience

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    1. Merci de ta propre patience, car je ne suis guère présente sur les blogs des copinautes ces temps-ci!

      Oui, je crois que cette collection valait le détour, et j'aimerais bien me rendre aussi un jour à l'Institut Clark lui-même... Quoi que tu en penses, il te faudra bien venir de ce côté-ci de l'Atlantique un de ces quatre. Mon voisin américain a tout de même raflé beaucoup de belles choses à la vieille Europe!

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  5. Coup de coeur comme toi pour "les oies dans le ruisseau" !!! Quelle lumière dans cette toile ! Notre toutoune souffre aussi du peu de promenade par ces temps froids. Je n'ose comparer à ton froid à toi :-)
    Bon courage pour les copies !

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    1. Les commissaires aussi avaient un faible pour cette toile placée sur un panneau central bien en évidence dès l'entrée de la seconde salle...

      Je rentre d'une promenade avec le grand chien, et c'est moi qui ai souffert! Elle préfère nettement le froid à la chaleur, et cela a le don de la revigorer, ce qui n'est malheureusement pas mon cas! Il faudra toutefois qu'elle prenne son mal en patience, car nous en avons pour toute la semaine, et je ne tiens pas à mourir frigorifiée avec le -20 diurne qu'on nous annonce pour mercredi!!!

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  6. Merci de partager vos émotions, vos enthousiasmes, de manière si spontanée et vivante. C'est infiniment agréable à lire.
    Bon courage pour la promenade avec "le grand chien"!

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    1. Tant mieux, Anne, car, comme je l'expliquais, le didactisme qui serait ma pente naturelle n'est pas nécessairement le style le plus approprié pour ce type d'échanges...

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  7. Les oies dans le ruisseau, un tableau que j'aime infiniment et que je connaissais, grâce au blog d'Ariane, guide à Giverny.
    Coup de cœur aussi pour Près du Lac de Renoir, que vous venez de me faire découvrir.
    Bonne soirée, Marie-Josée, faites des caresses à Honey de ma part pour sa patience

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    1. Merci, Tilia, pour ce lien. Je vais explorer ce site plus avant bientôt...Et je suis très heureuse de vous avoir fait découvrir ce Renoir de jeunesse!

      Je tarde un peu pour la seconde partie de mon billet, car le froid intense me transforme en marmotte endormie!

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  8. Je pourrai dire que je les aime tous mais, ça serait d'un commun après le si bel enthousiasme qui se dégage de ce sujet.
    Bravo aux responsables de laisser photographier;
    Merci à toi pour ce billet à chaud mais qui t'a congelée.
    Pauvre Honey, je lui fais de grosses caresses.
    Belle journée. Bises

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    1. Comme je le disais plus haut, j'ai hâte de voir si ce privilège n'était réservé qu'à la seule exposition consacrée à l'institut Clark. À la fin de la semaine prochaine, c'est une exposition consacrée au Pérou qui ouvre ses portes...

      Bonne fin de cette semaine frigorifiante chez nous!

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  9. A la lecture de votre billet je me disais "houlala ma vieille cela devient très très grave,voila que tu ne te souviens de rien ou presque"
    Ouf deux tableaux non présentés je me sens mieux.
    Cette exposition que j'ai vue deux fois je crois m'a laissé un délicieux souvenir
    Vous allez arriver à votre pause lorsque moi je vais mettre le nez dans le guidon.....Budget oblige
    Bonne journée

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    1. Je me souvenais que vous m'en aviez parlé, mais j'ai cherché dans vos libellés et n'ai pas trouvé...

      Il me reste encore quelques jours de correction et de «petits» problèmes à régler comme cet étudiant qui menace de se suicider si je ne lui mets par les quatre points (sur 100, pas sur vingt comme en France) qui l'écartent de la moyenne.

      Cela devient lourd parfois...

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  10. Roooo ! Mais comment ai-je fait pour ne pas voir ce billet ? Et bien il serait temps que je me reveille ! lol Un billet avec tes impressions impressionnistes "à chaud" : formidable !
    Alors ces oies de Monet, j'en suis "ringuedingue" ! il est si réussi ce tableau ! C'est au delà de tout entendement... Comment a fait Monet pour "prendre une photo" avec son pinceau ? L'eau me rapelle les eaux courantes et vivantes de Thaulow, je suis baba devant ! On la voit bouger, l'eau ! (Moi aussi j'ai mes impressions à chaud lol j'écris comme je parle depuis que j'ai commencé ce commentaire lol ! Désolée...)
    Je suis entièrement OK avec toi en ce qui concerne la toile de REnoir que tu trouves plus vivante que l'autre. La lumière joue d'une manière fort virtuose. La Toile vit. Par contre, "Claude et Renée" fait partie de la Période Nacrée de Renoir, sa dernière, et je la trouve très douce, très belle, même si elle n'a pas le relief et la lumière des périodes précédentes. Il y a moins de fougue et de jeunesse dans le pinceau, mais presque un coté "perfection". Comme si l'artiste, à la fin de sa vie, n'avait plus cherché qu'à lisser les turpitudes de la vie, une sorte de recherche de sérénité...
    Bisous Marie-Josée, je file voir la 2e partie de l'expo !
    Calin d'amour à Honey

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    1. Ne t'en fais pas, Nathanaëlle, moi, je vois les billets et je me désole de n'avoir plus «assez d'yeux» pour les lire après une séance de corrections. Mais... je suis en vacances et je vais faire du rattrapage!!!

      Je note pour Thaulow, car je n'ai jamais entendu ce nom...

      Pour Renoir, j'entends bien ce que tu me dis, mais je préfère le pinceau échevelé de la jeunesse malgré tout!!!

      Honey aura toute une kyrielle de câlins pendant les deux prochaines semaines, et j'ajouterai encore les tiens!

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    2. Thaulow, Frits Thaulow, un artiste norvégien, mais tu vas le trouver si tu épluches mon blog.

      ici avc sa bio :
      http://arts-lubies.blogspot.fr/2009/12/les-neiges-de-frits-thaulow.html

      et là :
      http://arts-lubies.blogspot.fr/2010/12/les-rivieres-dhiver-de-frits-thaulow.html

      Cela me fait penser que je pourrais reparler un peu de lui...

      Bises et belle Chandeleur !

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