Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






samedi 3 novembre 2012

Photo de la semaine (31) : féminisme?




Ayant dû composer, toute la semaine, avec la queue de l'ouragan Sandy, j'ai abandonné l'idée de partir à la pêche avec mon Nikon malgré la montée des eaux... Métaphore filée du samedi matin (!)

J'ai donc failli renoncer à ma participation hebdomadaire, mais, comme je ne suis pas une lâcheuse, j'espère que vous ne m'en voudrez pas de la qualité de ce cliché fait au Cégep avec le iPod qui se trouvait dans la poche arrière de mon pantalon...

Cette invitation épinglée sur les babillards du Collège m'a en effet retenue, car elle m'a semblé anachronique. Les fils d'argent qui parsèment désormais ma chevelure ne me permettant plus de me déguiser en étudiante, j'ai questionné les miennes pour savoir si elles iraient à cette réunion et si le mot «féminisme» avait pour elles un sens.  Silence, presque gêné je dirais. Personne n'a osé me répondre véritablement.  Comme je le pensais, le terme «féminisme» n'a plus beaucoup d'échos pour les jeunes filles de cette génération, à tout le moins au Québec où, il faut bien le dire, les apparences nous gâtent d'autant que l'élection récente d'une femme au poste de première ministre contribuera peut-être -mais attendons tout de même un peu avant de pavoiser- à percer le plafond de verre toujours présent au-dessus de nos têtes.

Je parle bien d'apparences, car peu de temps avant le discours inaugural de Pauline Marois à l'Assemblée nationale du Québec cette semaine, le député fédéral conservateur Stephen Woodworth a présenté, en septembre dernier, une motion pour tenter de faire modifier le statut juridique du foetus, pavant ainsi la voie à une éventuelle réouverture de la loi sur l'avortement. Bien que la motion ait été défaite, le vote de la ministre fédérale de la condition féminine, Rona Ambrose, en faveur de la motion en dit long sur ce qui grenouille du côté de la droite canadienne.  Ce n'est là qu'un des exemples du ressac observé ces dernières années...

Pour revenir à ma classe, j'ai tout de même réussi à jeter un pavé dans la mare et à susciter une petite remise en branle de l'activité neuronale de la gent féminine et estudiantine : nous disséquons, cette année, quelques passages des Femmes savantes.  Les vers suivants, extraits de la longue tirade de Chrysale à l'Acte II, ont suscité des demi-sourires qui disaient que l'on sentait bien ici le dix-septième siècle. Voici ces vers, en guise de rappel : 

Il n'est pas bien honnête, et pour beaucoup de causes,
Qu'une femme étudie et sache tant de choses.
Former aux bonnes moeurs l'esprit de ses enfants,
Faire aller son ménage avoir l'oeil sur ses gens,
et régler la dépense avec économie
Doit être son étude et sa philosophie.
Acte II, scène 7, vers  571 à 576


Après avoir commenté les paroles du mari de Philaminte, j'ai affiché à l'écran la photo de la jeune Malala Yousafzai : 

http://tribune.com.pk/story/453780/malala-out-of-coma-standing-and-walking-uk-doctors/


Assez étrangement, cette génération d'hyper-branchés suit assez peu l'actualité et seul un étudiant d'origine africaine avait entendu parler de la jeune collégienne agressée par les Talibans pour avoir défendu le droit des filles à une éducation de qualité.

J'ai allumé une petite étincelle avec ma conclusion-choc... je doute qu'elle enflamme un brasier, mais il faut tout de même rappeler périodiquement que la réalité que vivent les femmes québécoises est récente.  Les privilèges dont nous jouissons ne sont pas à la portée de toutes, bien malheureusement, et c'est une raison de plus pour tenter de les préserver et pour en tirer le meilleur parti possible.

Retrouvez les autres participants sur la page de l'initiatrice Amartia.