Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






lundi 3 janvier 2011

Agora (2) Autodafé

Comme l'annonce un peu l'image première de ce blog, une bonne part de mon existence tourne autour des livres.  Pour qui possède cet amour de la chose écrite, les scènes d'autodafé, au sens le plus commun du terme, sont toujours un peu traumatisantes.


Hypatie tentant de sauver quelques manuscrits
 Amenabar a intégré l'une de ces scènes dans le film Agora. Les chrétiens obtiennent finalement la permission d'envahir le Serapeion où se sont réfugiés les païens et ils détruisent tout ce qui leur tombe sous la main, sculptures tout autant que manuscrits, dans un élan de fanatisme comme il y en a malheureusement dans toutes les religions.

Au péril de sa vie, Hypatie tente, jusqu'à la dernière seconde, d'emporter le plus grand nombre possible de papyrus et de parchemins avec l'aide de quelques-uns de ses élèves et de son père, Théon, directeur de l'institution.



Serapis
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:SerapisHellenistic.jpg
 Le Serapeion était un édifice consacré au Dieu syncrétique Serapis. S'y retrouvait une partie des manuscrits conservés à la bibliothèque d'Alexandrie.  Les hypothèses concernant la destruction de la collection sont multiples.  Comme l'article en ligne de l'encyclopédie Wikipédia semble bien documenté, j'y renvoie le lecteur qui aimerait en savoir davantage :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Biblioth%C3%A8que_d%27Alexandrie  Contrairement à ce que je croyais, la disparition de cette bibliothèque mythique dans l'imaginaire occidental, ne résulte pas d'un seul incendie.

Dans le film Agora, la «profanation» de la bibliothèque constitue une scène d'autant plus violente qu'on sait fort bien qu'Hypatie a choisi de consacrer son existence à l'étude et que les papyrus lui tiennent lieu de compagnons de vie au grand dam du préfet Oreste qui, dans le film d'Amenabar à tout le moins, a explicitement déclaré sa flamme à la philosophe.  Voir les papyrus et les parchemins, parfois des exemplaires uniques, dérouler comme des serpentins puis brûler fait aussi mal au coeur que le rappel des autodafés perpétrés sur l'ordre d'Hitler ou l'anéantissement de la bibliothèque de Sarajevo en 1992...

Le visionnement de ce film m'a par ailleurs ramenée vers un ouvrage que j'avais vu passer, il y a bien des années et auquel je n'avais pas alors prêté grande attention : Hypatie ou la fin des dieux du romancier et essayiste québécois Jean Marcel.  Pour teminer ce second billet, voici les propos qu'il prête à Hypatie dans la lettre qu'elle adresse à Synésios de Cyrène :

Ce n'est pas à toi que j'apprendrai que quel que soit
le lieu où je me tourne dans mes souvenirs, un livre m'y attend.
Nourrie de lectures, dit-on, dès le sein de ma mère, il ne fut pas un
jour de ma vie où je ne me sois abreuvée à cette fontaine de sagesse
qu'est le jaillissement des lettres et des nombres sur
quelque papyrus ou quelque parchemin.

2 commentaires:

  1. Très intéressant article qui donne le goût de voir le film et de lire le livre.

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  2. Bonjour ishtar,

    J'aurai peut-être bientôt la version française du DVD qui semble être plus riche en suppléments non expurgés... On s'en reparle!

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