Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






vendredi 31 décembre 2010

Agora (1) Fin d'époque pour une fin d'année...

Affiche du film
URL : http://www.marsdistribution.com/film/agora
Le cinéma est au XXème et au XXIème siècle ce que le roman était au XIXe : l'art rassembleur pouvant contenir tous les autres... lorsqu'il s'agit de grands films évidemment.  Et lorsque c'est le cas, le Dieu DVD, comme le nomme la concierge de L'élégance du hérisson,  nous permet de revenir à loisir sur chacun des aspects de l'oeuvre et d'apprécier le travail des différents artisans. 

Malheureusement, le DVD du film Agora, dans la version accessible en Amérique du Nord, n'est pas très riche en suppléments alors qu'il y aurait pourtant eu matière.  Un documentaire d'une heure nous parle de la ville actuelle d'Alexandrie, mais j'aurais personnellement préféré que l'on revienne sur les décors recréés pour le film.  Voici quelques réflexions en attendant le blu-ray qui sera peut-être un peu plus riche...

Cette superproduction de deux heures fut tout d'abord présentée à Cannes en 2009.  Pour son troisième film, Amenabar s'attarde aux dernières années de la vie d'Hypatie d'Alexandrie, philosophe, mathématicienne et astronome qui fut l'une des rares femmes de l'Antiquité à tenir école.  L'Égypte est alors sous domination romaine, mais la présence de légions n'empêche pas les conflits entre Juifs et chrétiens.  La liberté de culte accordée à ces derniers les a amenés à passer de persécutés à persécuteurs selon une logique trop humaine.

Ce film a piqué ma curiosité pour trois raisons : l'antagonisme violent entre les représentants des religions révélées eux-mêmes, Juifs et chrétiens, et entre ces derniers et les païens; la ville d'Alexandrie et sa mythique bibliothèque et enfin le personnage d'Hypatie dont j'avais déjà entendu le nom à la faveur d'un roman paru au Québec en 1989, mais dont je ne savais pas grand'chose autrement...


Conflits religieux

En 391, la ville d'Alexandrie fait partie de l'empire romain d'Orient, le grand royaume d'Égypte étant devenu province romaine.  Une multiplicité de confessions s'y retrouvent et, comme dans le Liban d'aujourd'hui, il est difficile de faire régner l'ordre en pareilles circonstances.  Juifs et chrétiens s'affrontent tout comme chrétiens et païens qui vénèrent les anciens dieux grecs  ou égyptiens comme Sérapis.

Le film s'attache à dépeindre avec minutie le fanatisme des chrétiens et tout particulièrement des parabolani.  L'article anglophone de Wikipédia consacré à cette confrérie est plus riche que le francophone.  On précise entre autres que les membres de ce groupe qui a disparu après l'époque de Justinien s'occupaient des malades, même atteints de maladies contagieuses, et qu'ils espéraient ainsi mourir pour le Christ.  Amenabar les représente comme des fanatiques, tout particulièrement à travers le personnage d'Ammonius qui a toujours une pierre à portée de main pour agresser qui s'oppose à la seule foi recevable, la foi chrétienne.  Ce sont d'ailleurs les parabolani qui lapideront Hypatie en 415.

La nouvelle année s'approchant à grands pas dans ce coin du globe, je vous laisse en vous souhaitant santé, bonheur et prospérité, selon l'usage.  Je terminerai ce billet très bientôt...







mardi 14 décembre 2010

La Tournée d'automne




J'ai récemment commenté, dans un autre blog, La carte et le territoire de Michel Houellebecq, lu en septembre, avant qu'il ne soit «goncourisé», les Sirènes de l'actualité littéraire m'ayant pour une fois charmée...


Ce n'est pas ma pente naturelle.


Ayant un petit peu lu, j'ai plutôt tendance à revenir vers les sentiers déjà fréquentés, ce qu'approuveraient d'ailleurs très certainement et l'auteur, et le narrateur de La Tournée d'automne de Jacques Poulin.


Comme Anne Hébert, cet auteur québécois a longtemps vécu à Paris, mais, comme elle aussi, il a le plus souvent choisi le Québec comme décor de ses récits.


Dans La Tournée d'Automne, c'est même carrément la ville de Québec qu'il met tout d'abord en scène avant que le conducteur du bibliobus ne parte en tournée.


Sur les étagères de ma bibliothèque, cet ouvrage se trouve écartelé entre la littérature québécoise et la section des «livres-qui-parlent-des-livres». Car c'est là vraiment le propos fondamental de cette oeuvre de Poulin.


Le personnage principal, le Chauffeur, est en effet grand lecteur devenu passeur puisqu'il sillonne, l'été venu, les routes joignant les villages non desservis par une biliothèque.


Il a en effet transformé un vieux camion de laitier en «bibliothèque ambulante» savamment aménagée pour qu'on puisse aussi y retrouver le nécessaire pour dormir et se sustenter.


Imaginez le plaisir de transporter avec soi une bibliothèque! Et qu'on ne me parle pas de Kindle ou autre liseuse électronique. Voici ce que l'on ne pourra jamais faire avec de telles tablettes :


Il ouvrit une des portes arrière, abaissa le marchepied

et monta à l'intérieur... Après toutes ces années, le charme

opérait toujours : sitôt la porte refermée, on se trouvait

dans un autre monde, un monde silencieux et réconfortant

où régnaient la chaleur des livres, leur parfum secret et

leurs couleurs multiples, parfois vives,

parfois douces comme le miel.







lundi 6 décembre 2010

Entrée en matière : une reliure pérenne...

J'ai récemment reçu en cadeau un tout petit volume relié en cuir, édité à Limoges en 1895 : L'Évangile ou la vie de Jésus par le révérend père Alexis de Barbezieux, capucin.



Il s'agit d'une retranscription de l'Évangile, accompagnée de commentaires du révérend père lui-même ou de Bossuet...



Même si je ne suis pas croyante, je sais que la Bible est un fascinant recueil d'histoires que l'on nous demandait d'ailleurs de pratiquer assidûment dès l'entrée en hypokhâgne. Ce n'est toutefois pas cela qui me retient.



Le petit ouvrage du révérend père a manifestement beaucoup servi à l'édification d'une âme certainement plus pieuse que la mienne! Il a malgré tout survécu, car il provient d'une époque où l'on croyait à la pérennité des choses. On les fabriquait donc en conséquence. La reliure de cuir de ce livre de 115 ans est certes un peu fatiguée aux coins et aux plis de la couverture, mais elle n'a autrement pas bronché et les fils rouges et jaunes qui servent à retenir les cahiers sont toujours bien visibles, sans qu'aucun n'ait lâché.


Cette entrée en matière étant peut-être un peu longue pour un blog, je dirai dans un autre message, si tant est que celui-ci trouve lecteurs et lectrices, le livre que j'aurais aimé trouvé sous cette couverture avenante, dans un format que j'aurais plaisir à transporter partout avec moi : La Tournée d'automne de l'écrivain québécois Jacques Poulin.