Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






dimanche 11 août 2013

J'ai parfois l'esprit un peu pervers... (a)

Autoportrait aux lunettes dans quelques décennies



Il est des blogs que je fréquente pour «me rincer l’œil», comme celui de Fifi ou de Christine, photographes émérites ayant chacune son style; d'autres que je pille sans vergogne, mais en prévenant tout de même, pour la préparation de certains cours, comme celui de Michelaise ou de Tilia. Je place aussi le blog de Nathanaëlle dans cette dernière catégorie.

Les étoiles d'ArtLubie soufflant récemment quatre bougies, Nathanaëlle, avec la générosité qui la caractérise, en a profité pour distribuer des récompenses à quelques-uns des blogs qu'elle affectionne et dont je fais partie. Grand merci!


Elle m'a également invitée à réfléchir à un questionnaire que lui avait transmis Marie-Paule.  Mon classicisme ayant fréquenté l'affirmation pascalienne qui veut que le «moi [soit] haïssable», j'ai tout d'abord un peu hésité, mais voici le subterfuge que j'ai trouvé : je me propose donc de répondre de façon  détournée à ces demandes, dont j'ai modifié certaines entrées, en vous invitant à sélectionner vous-même ce qui, selon vous, me caractérise. Peut-être ai-je d'ailleurs fourni quelques réponses dans mes billets précédents, auquel cas, cette petite expérience permettra de rendre compte de notre degré de rétention des informations colligées lors de la lecture des blogs que vous et moi fréquentons depuis un petit moment.

Voici donc quatre questions -le questionnaire originel en comportait onze, mais je me permets aussi ce petit aménagement- et, si le jeu vous amuse, quatre autres suivront : 

I.  Christine saura répondre à cette première question, car elle attend toujours l'article que je dois lui consacrer : quelle est ma couleur préférée?
  1. le vert avec ses multiples nuances?
  2. le rouge que l'on porte volontiers lorsque les cheveux blanchissent?
  3. le bleu, celui du ciel et de la mer?
  4. le roux, genre terre de Sienne?
II.  L'objet dont je ne me sépare jamais?
  1. ma montre;
  2. ma plume Waterman;
  3. mon iPod;
  4. mon petit canif suisse.
III.  L'acteur ou l'actrice que je préfère... Ici, je tricherai un peu, car j'évoquerai seulement des acteurs de réputation internationale puisque la plupart des acteurs québécois ne vous seraient pas connus malgré leur talent certain.
  1. la britannique Vanessa Redgrave?
  2. l'italienne Anna Magnani?
  3. l'italien Vittorio Gassman?
  4. la française Fanny Ardant?
  5. le britannique Jeremy Irons?
IV. Enfin, dernière question qui ne comporte que deux choix, mais qui demandera réflexion, car je suis curieuse de voir les arguments que vous évoquerez pour justifier l'une ou l'autre position... vraiment curieuse, oui : suis-je cigale ou fourmi?

Portrait en jeune ébouriffée dans mon lieu parisien préféré qui est...?



vendredi 9 août 2013

Photo de la semaine (57) : Cyanocitta cristata

On pourra dire qu'il m'a bien fait marcher!!!




Évidemment, j'aurais pu me contenter du charmant moineau domestique qui prit gentiment la pose et la tint, ce qui me permit de le capturer dès le premier cliché : 




Je concéderai tout de même à l'autre qu'il m'a fait découvrir de bien jolis chemins pour user mes souliers :







Môssieur avait décidé de me faire tourner en bourrique.  Je l'ai donc suivi et poursuivi et, après de nombreuses tentatives pour lui «tirer le portrait», j'ai enfin réussi à immobiliser le délinquant qui déniche les oisillons des autres espèces et ameute le voisinage avec son cri ressemblant au bruit d'une poulie rouillée de corde à linge; ce sera donc ma photo de la semaine :


J'ajouterai toutefois que les objectifs dont je dispose ne me permettant pas de vous proposer une photo plus précise du Cyanocitta cristata, communément appelé «geai bleu», je me rabats sur le copain Wiki, en attendant l'autorisation d'Yves Toupin pour publier une très jolie photo hivernale montrant cet oiseau de dos, ce qui, à l'encontre des humains ainsi représentés, la plupart en tout cas, l'avantage beaucoup.



Cet oiseau ne se retrouve qu'en Amérique du nord. J'ai pu observer son côté grégaire, car il y avait tous les jours cinq geais bleus qui batifolaient dans le jardin de la maison des Laurentides.  Comme le précise toutefois madame Brûlotte, cet oiseau est plutôt méfiant, et il est donc difficile de l'approcher...

Je n'avais pas besoin de lire ces informations, mes observations sur le terrain m'ayant permis de les induire assez aisément!


Il s'agit de ma participation qui se fera plutôt bi-mensuelle qu'hebdomadaire en attendant ma lointaine retraite à moins qu'Amartia et les participants à sa photo de la semaine aient quelque objection...

P. S. J'aurais aussi pu me contenter de vous présenter le volatile à partir de la gravure  qui tient compagnie à Honey Comb sur le piano : 



Cette gravure est l'oeuvre de Richard Metzger. J'apprécie beaucoup le travail de ce graveur et ne lui reproche qu'une chose que je suis pourtant bien à même de comprendre : nous avons en commun le même amour des chiens. Ayant perdu le sien et ne voulant le remplacer, il refuse de représenter cette bête dans ses gravures... Je me rabats donc sur les oiseaux, possédant déjà quelques jolies mésanges et ce courroux de geais et lorgnant vers les cardinaux pour une autre occasion spéciale...










samedi 27 juillet 2013

Photo de la semaine (56) : petits bleuets au rendez-vous!




Pour me remettre de mes émotions, une petite virée dans les Laurentides s'imposait...
Pour celles qui ne connaissent pas, cette région est située au nord de Montréal.  Les premières manifestations de quelque élévation de terrain commence à une heure de la ville, et l'on atteint le plus haut sommet des Laurentides au Mont Tremblant, à deux heures de chez moi. 


Terre de colonisation peinte dans le célèbre roman de Claude-Henri Grignon, Un homme et son péché, cette région est aujourd'hui plutôt un lieu de villégiature pour les skieurs l'hiver et pour les amateurs de sports aquatiques, l'été, en raison de la présence de nombreux lacs.

Chasse et pêche y ont aussi droit de cité, surtout dans les Hautes-Laurentides, accessibles par hydravion. Mes seules chasses se résumant à celles que je pratique avec mon appareil-photo, je vous présenterai cette semaine quelques images de bleuets sauvages dont la récolte fut tout à fait satisfaisante...

Après la prospection -ci-haut-, la découverte : 


Juste à point, les petites billes bleues!


Pour certaines, on retournera la semaine prochaine...

Mais d'autres étaient déjà prêtes pour la cueillette!


Ma gourmandise ne leur permettra pas de se transformer en confiture, et un filet de crème sera donc leur seul ornement... Quand le produit est bon, pourquoi le transformer?

P. S. Participation un peu décalée à la photo de la semaine d'Amartia... J'espère que je serai excusée, car il n'y avait pas de branchement Internet à Brébeuf...




samedi 20 juillet 2013

Photo de la semaine (55) : un arbre est tombé...



Allez! Pour complaire à Christine qui s'impatiente, voici un résumé de ma semaine... La canicule ayant un impact sur l'entrechoquement des masses d'air, de violents orages se sont abattus sur le sud du Québec et ont eu raison de cet arbre qui se trouvait tout juste à côté de ma maison dont on voit un petit bout en haut à gauche. 

Si cet arbre avait eu la malencontreuse idée de tomber dans l'autre direction, ses branches seraient entrées dans ma cuisine, mais par le toit plutôt que par la fenêtre!

Je suis chanceuse dans ma malchance, malgré les dégâts que vous pouvez observer et ceux que vous ne voyez pas - arrachement de ma ligne électrique et endommagement du toit à l'arrière-, car la petite route est fréquemment empruntée, et j'y passais moi-même plusieurs fois par jour pour promener le grand chien.

Disons que, même si ce ne sont que des dégâts matériels comme me le faisait remarquer Françoise, ce n'est pas le moment le plus agréable de mon été et, si ce n'est pas la première fois, en 52 ans, que de jeunes hommes m'escortent pour sortir de ma maison, c'est la première fois qu'ils sont revêtus de leur lourd attirail de pompiers! 

La photo ci-dessous vous montrera l'ampleur du jumeau de «Celui de qui la tête au Ciel était voisine» et qui n'est plus, lui non plus, car l'agrile du frêne l'avait aussi sournoisement attaqué, menaçant ses jours et mon habitation...


Dommage, car, comme je le faisais remarquer à Amartia qui a aussi choisi ce thème pour sa photo de la semaine, j'aime beaucoup les arbres au point d'en avoir toute une kyrielle autour de la maison, mais j'avoue que je ne les verrai plus tout à fait de la même façon!


samedi 13 juillet 2013

Gabrielle Roy (1909-1983)



Je sors brièvement de mon mutisme estival pour célébrer un anniversaire, car en regardant ma montre, ce matin, j'y ai vu inscrit la date du 13 juillet, et cela m'a remémoré ce même jour, il y a trente ans, alors que mourrait l'écrivain qui a le plus marqué mon adolescence et dont la voix a certainement contribué a modelé la mienne qui s'y reconnut d'emblée : Gabrielle Roy.

La photo ci-dessus n'est pas de moi; elle montre l'auteur en 1945, au moment de la publication de son premier livre qui se mérita le prix Fémina : Bonheur d'occasion.  Cet ouvrage, dans la tradition du roman réaliste du dix-neuvième siècle, décrit les difficultés d'une famille de la classe ouvrière installée dans le quartier montréalais de Saint-Henri, où, comme ma mère, j'ai fait mes premières armes d'enseignante il y a un petit moment déjà. Ce n'est toutefois pas la portion de l'oeuvre que je préfère.  C'est plutôt  le versant inspiré par l'enfance manitobaine de Gabrielle Roy qui me retient, ce dont j'ai déjà parlé dans l'un de mes premiers billets.

Prendrez-vous le temps de lire le texte ci-dessous? En guise de commémoration, j'ai eu envie de vous faire découvrir quelques extraits d'un des chapitres que je préfère de Rue Deschambault (1955) : «La voix des étangs»... mais je n'ai pas réussi à découper ce texte où tout me semble important, depuis les réflexions premières de l'adolescente sur sa vocation naissante jusqu'aux propos échangés ensuite avec une mère clairvoyante, mais attristée. Alors je vous l'ai recopié en espérant que malgré le farniente si doux de l'été, vous trouviez quand même un petit reste d'énergie pour lire ces quelques pages...

La voix des étangs


    Dans les étangs non loin de chez nous, un soir, vers le mois d'avril, commençait une sorte de musique aiguë, vibrante, d'une tristesse douce pourtant, qui durait presque tout l'été, pour ne cesser que lorsque l'eau des étangs avait été bue toute par le soleil ou par la terre. 

    Les petites chanteuses, des centaines de grenouilles, étaient invisibles.  Sortant de l'hiver, de leur engourdissement, de la vase, retrouvaient-elles cette mince voix  éclatante pour se parler, se saluer d'un marais à l'autre? Ou bien ne revivaient-elles, n'échappaient-elles au fond gluant que pour remuer nos cœurs un temps par une musique étrange ? D'abord isolées, éparses, les voix finissaient par s'accorder et ne formaient plus bientôt qu'un long cri continu. Je l'entends encore qui vrillait par chez nous les nuits de printemps; jamais je n'ai entendu appel plus fort vers l'enfance, vers ses joies un peu sauvages.  


   J'allais encore souvent dans mon grenier, même quand je fus une élève studieuse, même quand je fus un peu plus âgée et au bord de ce qu'on appelle la jeunesse. Qu'allais-je faire là-haut?  J'avais seize ans, peut-être, le soir où j'y montai comme pour me chercher moi-même. Que serais-je plus tard?... Que ferais-je de ma vie?... Oui, voilà les questions que je commençais à me poser. Sans doute pensais-je que le temps était venu de prendre des décisions au sujet de mon avenir, au sujet de cette inconnue de moi-même que je serais un jour.


    Et voici que ce soir-là, comme je me penchais par la petite fenêtre du grenier et vers le cri des étangs proches, m'apparurent, si l'on peut dire qu'ils apparaissent, ces immenses pays sombres que le temps ouvre devant nous.  Oui, tel était le pays qui s'ouvrait devant moi, immense, rien qu'à moi et cependant tout entier à découvrir. 


    Les grenouilles avaient enflé leurs voix jusqu'à en faire, ce soir-là, un cri de détresse, un cri triomphal aussi... comme s'il annonçait un départ.  J'ai vu alors, non pas ce que je deviendrais plus tard, mais qu'il me fallait me mettre en route pour le devenir.  il me semblait que j'étais à la fois dans le grenier et, tout au loin, dans la solitude de l'avenir; et que, de là-bas, si loin engagée, je me montrais à moi-même le chemin, je m'appelais et me disais : «Oui, viens, c'est par ici qu'il faut passer...»


    Ainsi, j'ai eu l'idée d'écrire. Quoi et pourquoi, je n'en savais rien.  J'écrirais.  C'était comme un amour soudain qui, d'un coup, enchaîne un cœur; c'était vraiment un fait aussi simple, aussi naïf que l'amour.  N'ayant rien encore à dire... je voulais avoir quelque chose à dire...


    M'y suis-je essayée sur-le-champ?  À cet ordre baroque, ai-je tout de suite obéi? Un doux vent de printemps remuait mes cheveux, les mille voix des grenouilles emplissaient la nuit, et je voulais écrire comme on sent le besoin d'aimer, d'être aimé.  C'était vague encore, bienfaisant, un peu triste aussi.  Tout autour de moi étaient les livres de mon enfance, que j'avais ici même lus et relus dans un rayon dansant de poussière, tombé de la haute lucarne comme un trait de soleil.  Et le bonheur que les livres m’avaient donné, je voulais le rendre.  J'avais été l'enfant qui lit en cachette de tous, et à présent je voulais être moi-même ce livre chéri, cette vie des pages entre les mains d'un être anonyme, femme, enfant, compagnon que je retiendrais à moi quelques heures.  Y a-t-il possession qui vaille celle-ci? Y a-t-il un silence plus amical, une entente plus parfaite?


    Or, cette autre moi-même qui dans l'avenir m'invitait à l'atteindre, cette autre moi-même, ô douceur de l'ignorance! était vêtue comme je l'étais ce soir d'un blouson de serge bleu marine à grand col matelot, elle avait le même jeune visage un peu pensif, appuyé au creux d'une main, elle n'avait pas vieilli.


    Ma mère, un soir, vint me trouver dans cette pièce basse de plafond d'où je ne descendais plus, fascinée par les mille bruits de la nuit que j'apprenais à distinguer les uns de autres, fascinée, à ne plus rien oser, par l'ampleur, le mystère de la tâche que je m'étais donnée ou que j'avais acceptée.  Le chant des étangs faiblissait; à présent, détachées les unes des autres, les petites voix se cherchaient, avaient l'air de se répondre, ou de se séparer, peut-être...


    Maman me dit : 

-Pourquoi t'enfermes-tu toujours ici? Ce n'est pas de ton âge. Va jouer au tennis ou rejoindre tes amies. Te voilà toute pâle.  C'est pourtant le plus beau temps de ta vie. Pourquoi n'en profites-tu pas mieux?

    Alors j'ai gravement annoncé à maman ce qu'il en était : que je devais écrire... Et est-ce qu'il ne fallait pas pour cela venir au grenier, écouter longtemps, longtemps, les voix qui se croisent... et tant de choses qu'il faut démêler?


    Maman eut l'air tracassée.  C'était pourtant sa faute si j'aimais mieux la fiction que les jours quotidiens.  Elle m'avait enseigné le pouvoir des images, les merveilles d'une chose révélée par un mot juste et tout l'amour que peut contenir une simple et belle phrase.


-Écrire, me dit-elle tristement, c'est dur. Ce doit être ce qu'il y a de plus exigeant au monde... pour que ce soit vrai, tu comprends! N'est-ce pas se partager en deux, pour ainsi dire, un qui tâche de vivre, l'autre qui regarde, qui juge...

    Elle me dit encore : 
-D'abord, il faut le don; si on ne l'a pas, c'est un crève-cœur; mais, si on l'a, c'est peut-être également terrible... Car on dit le don, mais peut-être faudrait-il dire : le commandement. Et c'est un don bien étrange, continua maman, pas tout à fait humain.  Je pense que les autres ne le pardonnent jamais.  Ce don, c'est un peu comme une malchance qui éloigne les autres, qui nous sépare de presque tous...

    Comment maman pouvait-elle dire si juste? À mesure qu'elle parlait, ce qu'elle disait je le sentais vrai et déjà comme enduré.

    Maman avait les yeux au loin, et elle était si attentive à me bien protéger, à me défendre, qu'ils se remplirent de chagrin.

- Écrire, me dit-elle, est-ce que ce n'est pas en définitive être loin des autres... être toute seule, pauvre enfant!


    Les grenouilles reprirent, après un peu de pluie, leur chant d'ennui si prenant. Je pense qu'on doit s'ennuyer longtemps d'avance du long chemin à faire, du visage définitif que nous donnera la vie.  La curiosité de nous connaître, peut-être est-ce là ce qui nous tire le mieux en avant...


- Les mots parfois arrivent aussi à être vrais, ai-je dit à maman. Et sans les mots, y aurait-il une seule vérité dont on puisse dire : c'est ainsi, c'est vrai!


    Alors maman a eu un geste si désolé, si impuissant.

    Elle a dit en s'en allant :

- L'avenir est une chose terrible. C'est toujours un peu une défaite.


    Elle m'a laissée à la nuit, au grenier solitaire, à l'immense tristesse du pays noir. 


    Mais j'espérais encore que je pourrais tout avoir : et la vie chaude et vraie comme un abri -intolérable aussi parfois de vérité dure- et aussi le temps de capter son retentissement au fond de l'âme; le temps de marcher et le temps de m'arrêter pour comprendre; le temps de m'isoler un peu sur la route et puis de rattraper les autres, de les rejoindre et de crier joyeusement : «Me voici, et voici ce que j'ai trouvé en route pour vous!... M'avez-vous attendue?...Ne m'attendez-vous pas?... Oh! attendez-moi donc!...»






dimanche 16 juin 2013

Pause estivale


Normalement, la période estivale est celle où je dispose de temps pour lire, écrire et donc participer de façon plus active à la vie de la blogosphère.  J'ai pourtant, cet été, besoin d'une longue pause, coupure des travaux habituels pour tenter d'apaiser douleurs physiques et morales qui découlent d'une année sur laquelle je ne reviendrai pas ayant été déjà trop prolixe en matière de jérémiades ici-même...

Je me permets donc de vous souhaiter un bel été, et cela ne s'arrête évidemment pas à la température quoique de petits rayons de soleil réchauffent tout de même agréablement les vieux os.

Puissiez-vous faire le plein de moments enrichissants qui vous tiendront compagnie pendant les mois à venir et ajoutez-y quelques rencontres, hommes et bêtes, ces dernières peuplant avec constance et fidélité un quotidien qu'elles ne jugent jamais monotone pourvu que leurs humains s'occupent un peu d'elles.

Au plaisir de vous retrouver en meilleure forme dans quelques semaines

Bien à vous

Marie-Josée

vendredi 7 juin 2013

Photo de la semaine (54) : rouge ou bleu?



Non, me direz-vous : plutôt ROSE et bleu.  

Comme vous commencez à le savoir, j'ai une fâcheuse tendance à l'esprit de contradiction, et cela ne semble pas se résorber avec l'âge bien au contraire.  De toute manière, je n'aime pas le rose : enfant, j'étais d'un blond qui avoisinait le blanc. J'avais l'air de quoi dans les teintes pastel? D'une trépassée oui! Et, comme le petit Jésus m'a punie très jeune parce que j'ai toujours dit que je préférerais avoir les cheveux blancs plutôt que bruns, j'ai effectivement blanchi très tôt, à vrai dire l'année où mes parents ont eu la bonne idée de disparaître tous les deux à six mois d'intervalle alors que j'avais la mi-trentaine. Bon. 

Mais revenons-en à nos couleurs. Pastoureau nous expliquerait sans doute d'où vient ce couple de convention qui sert encore à préparer les chambres des futurs bébés lorsqu'on ne choisit pas tout simplement le jaune pour être sûr de ne pas se tromper.

Ne trouvez-vous pas, cependant, que ROUGE et bleu, c'est une lutte ou une complémentarité qui est plus d'égal à égal?

Toujours est-il que, cette semaine, à défaut de pouvoir faire un petit tour photographique à l'extérieur, car la pluie qui vous accable depuis des semaines nous a envoyé sa petite sœur avec de la froidure en prime, j'ai décidé de revenir un instant sur l'exposition consacrée au Pérou qui se termine dans une semaine pour laisser place à la grande exposition estivale sur les créations de verre de Chiuly dont je vous ai récemment montré une première manifestation. 

Je ne vous parlerai pas très longuement de l'exposition en elle-même. Je suis allée voir pour suivre les conseils de Michelaise qui dit qu'il faut élargir ses horizons même si l'on ne se sent pas d'affinités avec les sujets ou les artistes présentés, mais j'ai la tête dure et les arts précolombiens ne m'attirent guère d'autant que je suis tombée sur un vase qui présentait un Inca sacrifiant un chien! Du coup, je me suis précipitée vers la sortie. Des humains, passe encore, mais pas des chiens!

Or, la dernière salle m'a retenue, car on y présentait des peintures relevant de ce courant que je venais de découvrir dans l'ouvrage que Le Clézio a consacré à Diego et Frida : l'indigénisme. Il s'agit d'un mouvement politique et artistique tendant à revaloriser la culture indienne effacée ou mutilée par les conquêtes espagnoles.  Je me suis d'ailleurs fait la réflexion que je n'avais jamais entendu parler de quelque chose de similaire au Québec, mais il faudra que je creuse la question pour vous en reparler.

Julia Manuela Codesido Estenòs


Julia Codesido
L'oeuvre  que j'ai retenue, les trois chefs indiens, est d'une peintre péruvienne se nommant Julia Codesido (1892-1979) et date de 1950. Ce rouge qui donne préséance aux vêtements des trois chefs plutôt qu'à leur physionomie m'a aspirée. Il m'a d'ailleurs fallu un petit moment avant de comprendre que ces trois taches de couleur vive étaient des ponchos servant à recouvrir trois corps pour le moins grêles...En cherchant quelques informations au sujet de cette artiste j'ai constaté, une fois de plus, à quel point nos frontières culturelles sont en définitive plutôt étroites, car l'essentiel de la documentation sur le Web est en espagnol.  Comme c'est une langue que j'ai eu le plaisir d'étudier pendant quelques années, voici un résumé des infos colligées.

Cette jeune femme provient d'un milieu aisé, son père étant consul, ce qui lui a fourni l'occasion de séjourner en Europe  alors qu'elle était  à la fin de l'adolescence, période où les émotions ressenties atteignent un paroxysme qui ne sera plus qu'occasionnel par la suite.  Elle eut donc l'occasion de visiter plusieurs musées en France, en Angleterre, en Suisse et en Espagne et de sentir l'agitation artistique qui animait cette période de l'avant-guerre nommée la Belle époque à laquelle le Musée de la civilisation de Québec consacre d'ailleurs une exposition que j'ai hâte de visiter cet été. 

À son retour au Pérou, elle s'inscrivit à l'école des Beaux-Arts de Lima où elle fut également, par la suite,  professeur de peinture et de dessin. Je ne m'aventure pas à vous donner des dates, car il existe des erreurs manifestes dans l'article de Wikipédia qui sont relayées par d'autres sites que j'ai consultés. Je me contenterai donc de vous souligner l'importance de José Sabogal, autre peintre représenté à l'exposition, qui fut l'un de ses maîtres.  Si je vais un jour au Pérou ou, plus modestement, si je trouve quelque chose de plus étoffé à la bibliothèque, je vous apporterai ce complément d'information. Les ouvrages, plutôt européo-centrés que je possède comme le dictionnaire de la peinture de Laclotte et Cuzin chez Larousse ou L'Aventure de l'art (XXe siècle) de Ferrier ne mentionnent ni Codesido ni Sabogal pourtant considéré comme le chef de file du mouvement indigéniste péruvien. 

L'audioguide téléchargeable qui accompagne l'exposition met l'accent sur l'aspect résolument moderne de cette oeuvre qui appartient à la dernière période de production de l'artiste après son passage au Mexique en 1935 où elle fit notamment la connaissance de Rivera et d'Orozco. 

Je vous laisse sur une oeuvre antérieure, mais la préparation de ce billet m'a donné envie de faire un nouveau saut au Musée. Peut-être essaierai-je donc demain de me glisser entre quelques gouttes de pluie pour compléter mes connaissances...


Les chandelles, 1931



Je suis peut-être un peu volubile pour parler encore de «photo de la semaine», mais vous pouvez tout de même retrouver les autres participants chez Amartia qui ne m'en voudra pas...